EP 1 : BRISTOL FOODTRUCK PARTY

L’insigne est à la maison et Frank ne sait pas vraiment quoi faire. Ça le démange de retourner derrière son bureau, de continuer à travailler. À faire fonctionner ses méninges pour sauver cette ville des flammes de l’enfer. Déjà un an de pure folie et la suite ? La suite ne va pas être simple et ça l’emmerde d’avoir les mains dans les poches, d’observer tous ces stands, tous ces visages joyeux. Il n’a jamais été du genre à prétendre que tout va bien, quand tout va mal. Il a pourtant l’impression que c’est ce qui se passe. Depuis l’explosion du palais de justice, une petite voix lui rappelle en boucle que la mort de Joe n’est aussi qu’un présage de sa propre destinée.

Chemise colorée, lunette de soleil et chapeau de paille. Se fondre dans la masse, ce n’est vraiment pas difficile. Le problème, peut-être, c’est qu’il n’a rien à manger dans la main et aucun objectif – non, il ne mène pas une nouvelle enquête mystérieuse dans l’ombre. Il est juste en congé, comme n’importe quel autre employé. Il aurait pu retourner voir sa famille pour quelques jours, mais il veut être présent par précaution. Avec Bristol, on ne sait jamais…

« Moi j’ai de l’argent. » Il pose un billet et relève ses lunettes pour croiser le regard ennuyé du vendeur puis lève ses deux doigts pour préciser qu’il demande bien deux fois la même chose. Une bonne action pour sa conscience ? « Vous êtes nouveau... ici ? » Qu’il prononce dans un Espagnol franchement maladroit.

@Jesus Vargas

— CAN I EAT THEM ALL? YES.

Darius n’était pas un romantique. Clairement. Il n’était pas de ceux qui s’envolent à Paris, font dans l’éloquence, et les grands discours qui font pleurer dans les chaumières. Il est encore moins démonstratif, en public. Alors, l’idée de se mêler à la foule de Bristol, un an après le meurtre de la flic dans une foule similaire … ne l’enchantait guère. Encore moins car cela impliquait Robyn, et que clignotait l’avertissement au-dessus de sa tête. Et si c’était elle, la suivante …
Or, c’était elle qui lui avait proposé la sortie ; et il n’allait pas pouvoir refuser éternellement, alors que l'événement s’étalait sur plusieurs jours. Il a fini par abdiquer, conscient qu’il n’y échapperait pas, à la seule condition de pouvoir emmener Penny. Sa chienne Rottweiler aurait au moins le sacré avantage de tenir à distance toute personne susceptible de venir lui adresser la parole … un bénéfice certain.
Dax ne voulait pas que qui que ce soit vienne faire l’erreur de lui adresser la parole alors qu’il était en compagnie de la docteure, ne voulant ni lui mentir, ni devoir déformer la vérité pour la rendre … plausible. Penny serait son assurance.

C’était ainsi qu’il s’était retrouvé avec la laisse dans une main, un wrap garni de falafels dans l’autre. La chienne, impressionné par tant de monde, ne quittait pas ses talons - presque littéralement, alors qu’elle était même assise sur le bout de ses chaussures.
Faut vraiment que je retourne à la salle. A surveiller Dev … j’me suis pas bougé ! Je sens mes muscles qui se transforment en graisse, là, regarde-moi j’mange un truc sans viande … Faut que je reprenne le sport. Lequel, je sais pas, mais au moins la muscu ...

— CAN I EAT THEM ALL? YES.

Les tripes hurlent à mort, à faim, à sang, et Tiago n’était pas là pour l’aider. Pas cette fois. Il déteste tout de cet endroit, surtout l’odeur. Si délicieuse, si alléchante … il pourrait errer des heures ici, s’imaginer dévorer là un sandwich, là un burger, là un hot-dog … il s’arrête enfin vers un foodtruck qui semblait avoir un peu de cuisine tex-mex à proposer. Mais bon, ici, l’estomac dans les talons, il saurait s’en contenter.
C’est en espagnol qu’il glisse sa requête, en tentant de ne gêner aucun client. Il n’avait rien à perdre - littéralement. Rien à donner, non plus, en échange.
C’est un autre client qui s’approche - et alors que Jesus pense à s’éloigner, il reconnaît l’espagnol maladroit. Meilleur que son anglais, cependant. Il ne sait pas trop ce qu’il se passe - il semblerait que le client lui paie à manger, ou bien n’est-ce qu’un rêve éveillé, où l’inconnu prend à manger pour lui et sa femme. L’espoir est mince, mais l’effort de l’homme lui vaut au moins une réponse. La peur aux tripes - celle de se trouver face à quelqu’un qui ne désire qu’une chose, que les étrangers rentrent chez eux.
Puis, il y en a d’autres qui se pressent près de ce foodtruck - deux jeunes.
Ahem, yes. Une fois n’est pas coutume, il préfère continuer en espagnol. C’est moins pénible - ça épargne les rares neurones qui ont survécu à ses trente-deux années. Votre espagnol est meilleur que mon anglais. Et oui, je suis arrivé il y a quelques semaines ici … Il ne mentionne pas les autres semaines, passées à Londres - une durée trop longue, trop suspicieuse peut-être. Il reste sur ses gardes, ne sachant pas encore à qui il avait à faire. Des semaines bien trop longues pour justifier de son niveau d’anglais ... inexistant. Apprendre l’anglais, c’est difficile. C’est vague, c’est flou. Mais Jesus parle à quelqu’un d’autre que Tiago, et pour le moment, la conversation n’était pas hostile. Pour le moment, il pouvait encore prétendre.

— CAN I EAT THEM ALL? YES.

Le Dax d’il y a un an ou deux ne se reconnaîtrait sans doute pas. Lui ici, avec Robyn, avec … ce wrap sans viande dans les mains - et son abonnement à la salle oublié dans un recoin d’un tiroir. (Oui, il l’avait égaré.) Damn. Mais ses vieux réflexes persistent, et désormais que les choses s’amélioraient avec Dev … Dax pensait à remplir son emploi du temps. Reprendre le sport était une idée comme une autre, qu’il lui partage alors que bouger lui manquait. Cependant, il avait toujours fait trop, toujours fait fort, et les risques pour sa santé étaient là. Sous son crâne. A attendre le coup fatal.
Hmm-hm, il acquiesce du bout des lèvres, sa raison l’emportant clairement - on le lui avait suffisamment répété, tout au long de sa vie, l’importance de varier sa nourriture et ne pas manger trop gras, et il ne doutait pas que l’avis de sa petite amie était également influencé par ses connaissances médicales. Mais de là à l’affirmer haut et fort - ça non. Avec la chance qu’il avait, elle serait capable de le mener sur un régime végétal, ou du moins, un régime sans fast-food. Mais bon, la nourriture était assez relevée pour qu’il oublie le manque de bœuf.

Mais le reste, le reste … l’audace ! Il n’a pas les mots, sous le choc, alors qu’il se contente de rire de ses confessions. Mieux valait en rire, que d’imaginer le pire. Son visage se ferme ensuite en un instant, alors que le sérieux revient au galop. Non. Il la jauge, stoïque, pendant quelques secondes. Non. Pas moyen. J’irai à la salle demain. Sauf si tu veux vraiment aller courir ? Comme quoi, une simple phrase, a priori innocente et plutôt rassurante … l’avait complètement reboosté pour retourner travailler sur son physique. Pas moyen qu’il ressemble à un tas de graisse avant - au moins - ses 70 ans. Et vu la masse qu’il avait … il se devait de s’entretenir.
Aucun de mes coachs n’a jamais été aussi motivant. Ni aussi canon.

— CAN I EAT THEM ALL? YES.

Il n’était pas venu accompagner Robyn au festival du food-truck pour soudainement retrouver sa motivation à faire du sport – but here we are. Food-truck avec cette odeur de fast-food dans l’air, et si son wrap était végétarien, c’était sans aucun doute une exception dans les environs. C’est Robyn qui le motive, l’air de rien, en disant que le voir plus gras ne le dérangeait pas.
Tu m’en voudras si je ne t’attends pas ? Il doutait qu’ils aient le même rythme à la course à pieds – et doutait encore plus de réussir à se maintenir à son rythme à elle. Ou alors, faut qu’on aille courir sur des tapis. Et on sera au sec. Ce qui était … un détail important, à Bristol.

L’idée que ça soit elle qui le motive était étonnante. Pour elle, il soulèverait de la fonte et parcourrait des kilomètres. Sans se mettre en danger. Sans risquer de s’ouvrir le crâne. Il le fallait. Et ses baisers pour toute récompense lui suffiraient.
Enfin, c’est elle qui remarque Frank, au loin. Dax a beau faire une tête de plus que la plupart des personnes qui l’entourent, il a du mal à discerner le chef de la police … sous le couvre-chef qu’il arbore. T’es sûre ? Mais il parvient à voir un bout de son visage, des traits familiers. Si c’est lui … il aurait mieux fait de rester en costume. Ses efforts estivaux ne passaient pas inaperçu, en tous cas.
Il revient peut-être de vacances. C’est quand, les tiennes ? D’un coup, ça le frappe. Avait-il jamais vu Robyn prendre un seul jour de congé, en dehors de ses repos obligatoires ?

L’apparition du chef de la police ne semble pas passer inaperçu et la foule lui lance quelques regards curieux. Le vendeur devant lui est même tout intimidé et lui offre généreusement sa commande. On peut dire que c’est un jour de chance pour  @Frank Emmerson  et sa nouvelle rencontre :  @Jesus Vargas

L’ambiance générale se focalise de plus en plus sur le concours de nourriture qui se met en place non loin. Certains sont déjà prêts, serviette autour du cou et fourchette en main. L’odeur des saucisses commence à prendre possession des lieux mais @Robyn Lahiri repère une opportunité assez rare : le stand indien est libre et elle meurt d’envie de faire goûter de bons dosas à son compagnon @Dax Lloyd. Sur le chemin, celui-ci trébuche sur un portefeuille plutôt blindé que quelqu'un avait eu la malchance de faire tomber et Penny en profite pour filer : il faut dire que le dessert que @Remus Wells a en main lui fait vachement envie, et l'acteur se penche pour lui offrir quelques caresses en guise de lot de consolation.

— CAN I EAT THEM ALL? YES.

Il aurait aimé lui parler de vacances encore un peu plus. Prévoir leur prochaine sortie, leur prochaine fuite. Il valait mieux noyer le poisson Frank Emmerson dans une autre conversation, de toute manière.
Leur premiers wraps finis, Dax estima avoir encore de la place pour tester autre chose … mais il y mit les formes, pour calmer l’enthousiasme de Robyn. Tu penses que je vais tenir, sans viande ?
Il repère une poubelle dans l’assemblée, et en se concentrant pour faire le meilleur panier de sa vie - et se débarrasser de l’emballage de leur premier repas - qu’il trébuche en reculant d’un pas. Sa cheville vacille, et il manque de s’effondrer de peu. Et alors qu’il tente néanmoins de sauver l’emballage pour éviter que celui-ci ne touche le sol, il sent la laisse lui échapper. La certitude que Penny resterait à ses côtés fut mise à mal, alors que la chienne, sans doute apeurée par ses mouvements brusques et le reste des badauds les entourant, avait déjà mis les voiles.
Dax prit une seconde pour regarder ce qui l’avait fait trébucher, s’attendant au pied d’un voisin mécontent, ou à une boisson abandonnée. Un gros caillou, même. Il se retrouva face à un porte-monnaie, qu’il glissa sans scrupules dans sa poche arrière. En temps et en heure, il en regarderait le contenu. Retrouver Penny était plus important.  OK, tu vas au stand, je te rejoins quand j’ai retrouvé Penny. Tu me fais signe si jamais tu la retrouves en chemin ?

Dax ne peut pas se faufiler entre les passants - c’est un fait physiquement prouvé. Mais il a l’avantage certain de dépasser la plupart des autres personnes environnantes, et en prenant la direction approximative qu’avait suivi sa chienne en s’éloignant, il ne mit pas longtemps avant de la retrouver - une chance. Elle aurait pu fuir encore et encore et encore, mais il la retrouva assise près d’un inconnu, à baver sur ses chaussures.
Penny ? Il appelle une dernière fois, après s’être époumoné pour tenter de la rappeler. La rottweiler se relève vers lui, avant de se secouer pour éliminer le stress. Quant à lui, il récupère la laisse, avant de vérifier que la muselière est bien en place. Euh … merci. Elle est partie en une seconde, j’ai pas … Il s’arrête dans ses excuses trop facile, quand il se rend compte que le faciès lui est familier. Impossible pourtant de mettre un nom dessus. Euh, on se connaît ? J’ai l’impression de vous avoir déjà vu …

— CAN I EAT THEM ALL? YES.

Tout se passe un peu comme un rêve. C’est flou, ça sort de partout, et il comprend pas la moitié de ce qu’il se raconte. Du coin de l’oeil, il voit son sauveur se voir refuser tout argent par le vendeur - qui lui rend pourtant les deux commandes.
De l’autre côté, deux jeunes semblent lui porter un intérêt certain - et l’un se rapproche avec son téléphone pour un selfie. Ah - donc il se trouve aux côtés d’une star locale, bien que Jesus n’aie pas la moindre idée de qui il était. Généreux, en tous cas, assez pour lui avoir proposé de lui offrir quelque chose, assez pour tenter de converser avec lui en espagnol.
Il ne sait pas trop comment lui parvient l’information du concours de nourriture, au milieu de tout ça. Son sourire s’élargit, alors même qu’il tenait enfin un peu de nourriture entre ses mains. Cela lui semblait comme une très mauvaise-bonne idée, mais au pire … il aurait l’estomac plein ce soir.
Un concours ? Vous voulez venir ? Je pense y participer ! L’enthousiasme rythme ses locutions en espagnol, alors qu’il fait de grands signes, pour inviter les deux jeunes également. Allez, venez !
Sans doute qu’il faisait perdre du temps à tous, mais Jesus s’élance vers l’endroit où les micros commencent à résonner, se glisse jusqu’au bord de l’estrade où de premiers concurrents sont déjà assis. Il n’avait aucune idée de ce qui l’attendait, mais il était partant. Malgré l’indigestion qu’il s’était faite au même genre de concours, quelques années plus tôt ...

Son espagnol n’est pas au top, mais il se souvient des bases. Des cours qu’il avait pris avec une de ses demi-sœurs pour mieux comprendre ses origines. Il s’était vite ennuyé et était passé à autre chose, mais maintenant, il se maudit de ne pas avoir été plus attentif.

Le billet posé sur le comptoir, le vendeur prépare la commande et Frank se tourne vers l’homme à ses côtés. L’homme qu’il cherche à aider, visiblement. Il comprend le mot « semaine » et se dit que c’est peut-être un touriste, même son instinct essaye de lui dire tout le contraire.

« Oui, j’imagine. » Il se gratte la nuque et regard autour de lui. Ce n’est pas à lui de chercher les immigrants qui traînent sur le sol anglais. Il est hors service, et à moins d’être face à un crime affreux, il refuse d’agir en tant que policier. Après tout, c’est une journée off, non ? Il devrait en profiter pour être simplement Frank, et non le chef de la police de la ville… Un peu d’humanité aussi, après tout ce qui s’est passé, ne devrait faire de mal à personne.

Par chance, le vendeur revient vite, pose sa commande et refuse son argent en ponctuant le tout d’un clin d’œil. « Merci. C'est gentil à vous. » Vraiment, il est confus de cette soudaine générosité, mais ça lui apprendra à enlever ses lunettes de soleil. Il est encore plus confus quand un jeune l’aborde pour lui demander une photo et qu’il accepte sans trop savoir pourquoi. « D'accord... » Il a juste le temps de remettre ses lunettes sur le nez et de faire un semblant de sourire, que l'étranger lui propose d'aller participer au concours d'à côté.

« Oh non, ça ira… » Comment le dire en espagnol déjà ? Aucune idée, mais Frank se retrouve avec le double de sa commande dans les mains et reconnaît le jeune Costigan. Ne sachant quoi dire ou faire, il finit par suivre Jésus et s'éloigner, priant pour trouver une sortie de secours ou quelque chose dans le genre. Compliqué, vraiment. Il se retrouve au milieu des participants et le présentateur semble avertir tout le monde de sa sublime présence... Shit.

@Jesus Vargas  @Yaya Dembele  @Moriarty Costigan